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« J’avais mal dans mon corps, dans ma tête, et la seule façon que j’avais d’oublier cette douleur, c’était de boire »

La première fois que je commence à boire, j’ai 12 ans. Je suis chez une amie, on pique une bouteille dans la cuisine de ses parents. Je sens tout de suite que je vais devenir accro. Dans ma famille, beaucoup de mes proches ont des problèmes d’addiction, que ce soit avec la drogue ou l’alcool. On pourrait presque dire que je suis née comme ça ; j’ai toujours eu un penchant addictif. Plus jeune, c’était la lecture. Je lisais sans arrêt, oubliant de manger, de dormir, de boire, de faire mes devoirs. Mes parents m’ont alors confisqué tous mes livres pendant plus d’un an. En réaction, j’ai commencé à beaucoup dormir. Plus de quatorze heures par nuit. Là aussi, mes parents ont dû me secouer. Comme j’étais en manque, j’en suis même venue à m’automutiler. J’avais mal dans mon corps, dans ma tête, et la seule façon que j’avais d’oublier cette douleur, c’était de boire.
Dès le départ, je bois et je me drogue seule ou avec mes amis. A quatorze ans, je suis sur les quais de Seine en bande. Je ne me rends pas compte, mais j’absorbe un litre de vodka à moi seule. Quand je me lève, je ne tiens bien évidemment pas debout. Je prends un Uber mais je vomis dedans. Le conducteur me laisse seule, sur le périphérique, près de la porte de Pantin. Je n’ai plus de batterie sur mon téléphone, je ne sais pas où je suis. Heureusement, un groupe de six amis vient à mon secours et j’arrive à leur réciter le numéro de ma mère. Elle vient me chercher affolée, mais heureuse qu’il ne me soit rien arrivé. En reparlant plus tard de cet épisode avec elle, je me suis rendu compte que le groupe d’amis n’était pas composé de six personnes, mais de trois. Je voyais double.
C’est la seule fois où ma mère me voit bourrée. Dès que je bois, je mens à mes parents. Quand je vais en soirée, je leur dis que je vais chez des amis faire une soirée pyjama. Je leur raconte les frasques alcoolisées de mon entourage, en omettant toujours que la personne la plus ivre, ce n’était pas eux mais bien moi. Au lycée, je ne peux pas aller en cours sans boire.
J’attends devant le Monoprix chaque matin jusqu’à ce qu’ils ouvrent pour pouvoir acheter une bouteille de vodka que je descends cul sec. Je n’ai d’ailleurs jamais été contrôlée sur mon âge lorsque j’étais mineure et que j’achetais de l’alcool. Au lycée, les profs me soupçonnent de consommer en cours mais n’ont aucune preuve. Je ne suis jamais convoquée. Je suis souvent absente et j’obtiens mon bac par miracle, en grande partie grâce à la crise sanitaire.
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